• L'amour au Moyen-Âge

     

    « L’amour n’est pas du corps seulement puisqu’il vise quelqu’un, et il n’est pas de l’esprit seulement puisqu’il le vise dans son corps. » Maurice Merleau-Ponty, Essais philosophiques, « Lecture de Montaigne »

     

     

     

    Cet article s’est inspiré des travaux de Jean Verdon, lui-même retraçant les émotions au Moyen-Âge au travers des écrits, notamment clérical et fait par des hommes. Ces recherches excluent donc l’Orient et le point de vue des femmes occidentales.

     

    Lorsque l’on parle d’amour aujourd’hui, on pense plutôt dans cet ordre : sentiment, sexualité (peut-être mariage), plaisir et éventuellement procréation. Tandis qu’au Moyen-Âge, on pense mariage, sexualité, procréation, le sentiment peut venir, mais le plaisir lié au corps, est interdit par l’Eglise.

     

                Durant cette époque, ce schéma était d’autant plus important que le mariage, notamment chez les aristocrates, est un moyen de préserver ou d’acquérir du patrimoine et surtout, pouvoir le transmettre. 

     

    De plus, Jean Verdon nous explique que l’on distinguait, durant cette longue période de mille ans, l'amor (passion violente, charnelle et dangereuse pour l'Eglise) et la caritas (amour chrétien, fraternel). Au cours du Haut Moyen Âge, les textes n'utilisent pas le mot amor dans un sens positif. L'affection est exprimée par d'autres mots. C'est le discours clérical qui fixait la norme en reléguant les sentiments après le mariage et excluait le plaisir sexuel (tandis qu'aujourd'hui, les sentiments et la sexualité se forment en dehors de toute obligation de mariage ou de procréation). Pourtant, les sentiments et le plaisir existaient comme le prouvent les lettres de rémission ou la correspondance célèbre (et toujours discutée) entre le maître de philosophie Abélard et son élève Héloïse.

     

    Cependant, les rapports de force n'ont pas toujours été favorables à l'Eglise. Au haut Moyen Âge, les rois mérovingiens ont pu pratiquer une polygamie (encadrée) dans le souci d'établir des alliances et pas seulement pour satisfaire leur libido. Paradoxalement, malgré d'évidentes positions misogynes, l'Eglise a pu protéger les femmes en s'opposant de plus en plus fermement aux répudiations, aux violences ou à la polygamie. La publicité des bans de mariage et la dénonciation des mariages clandestins ont ainsi permis de lutter contre la répudiation.

    L'amour courtois (le fin'amor dans les textes), réservé à l'aristocratie, est en fait une construction orale et littéraire des troubadours (poètes lyriques de langue d'oc) qui osent traiter pour la première fois des sentiments amoureux. Néanmoins, le fin'amor est assez éloigné de la réalité aristocratique. Affaire des femmes dans les écrits, l'amour est dans la vie plutôt l'apanage des hommes et des stratégies matrimoniales. L'amour courtois ne vise jamais le « fait », c'est-à-dire les relations sexuelles. C'est un rapport sublimé entre deux êtres (ou dit autrement un « amour spirituel ») qui recherche le désir sans jamais l'assouvir. Cet amour est le plus souvent adultère et donc réprouvé par l'Eglise.


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